Je pensais qu’ils n’allaient pas survivre.
Quand je les ai trouvés, ils étaient à peine vivants. Minuscules. Silencieux. Froids. Il y en avait deux. Deux petits chômeurs. Deux petites boules de poils qu’une maman n’a pas pu – ou pas voulu – sauver. Et moi, j’étais là, avec mes mains trop grandes, mon cœur trop serré, et ce sentiment qui te traverse quand tu sais qu’une vie ne tient qu’à ton souffle, à ta chaleur, à ta vigilance.
Depuis, je dors par tranches de deux heures. Pas plus. Parce qu’ils mangent toutes les deux heures. Parce que leur ventre vide, c’est leur vie en danger. Mais tu sais quoi ? Je les vois respirer. Grandir. S’accrocher. Et je crois que plus on les connaît… plus on les aime.
Comprendre ce que vit un chaton orphelin
Un chaton, à la naissance, est aveugle, sourd, incapable de réguler sa température. Il ne sait ni faire pipi, ni manger seul. Il a besoin de sa mère pour absolument tout. Alors quand elle n’est pas là… c’est toi. Toi, sa chaleur. Toi, son lait. Toi, sa respiration.
Leur détresse, tu la sens dans leurs petits gestes maladroits. Mais ce n’est pas de la faiblesse. C’est de la force fragile. C’est un appel silencieux à exister. Et c’est là que tu commences à apprendre.
Ce qu’il faut vraiment avoir pour les biberonner
Il ne s’agit pas de les nourrir. Il s’agit de recréer un environnement où leur petit corps peut se développer sans leur maman. Voilà ce que tu dois absolument avoir sous la main :
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Du lait maternisé spécifique pour chatons (surtout PAS du lait de vache)
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Un biberon adapté (ou une seringue si besoin)
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Une source de chaleur constante : bouillotte, coussin chauffant ou même une bouteille d’eau bien enveloppée
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Un linge propre et doux, toujours à portée de main
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Un endroit calme, isolé du bruit, sans courant d’air
Et je le dis sans détour : tout ça ne sert à rien si tu n’es pas prêt à t’impliquer jour… et nuit.
Les horaires : la discipline qui sauve
De 0 à 7 jours : toutes les 2 heures. Oui, même à 3h du matin. Même quand t’es en larmes.
De 7 à 14 jours : toutes les 3 heures.
De 14 à 21 jours : toutes les 4 heures, et parfois tu peux espérer une nuit presque complète.
Le lait doit être à température corporelle (≈38 °C), ni plus ni moins. Tu verses quelques gouttes sur ton poignet pour tester. Et toujours, toujours, donner le biberon en les tenant sur le ventre, jamais sur le dos.
Ce que le biberon ne te dit pas
Il y a des signes qui ne sont pas dans les manuels.
Un chaton qui suce trop vite et s’étouffe. Un autre qui dort trop profondément et qu’il faut réveiller pour le nourrir. Celui qui préfère le contact de ton doigt à la tétine. Celui qui te regarde (sans voir) comme si tu étais sa mère.
Chaque tétée est un échange. Un message. Une preuve de confiance.
Et parfois, ce n’est pas qu’ils ont faim. C’est qu’ils ont peur. Froideur. Ou solitude. Et c’est à toi de le comprendre, pas à eux de l’expliquer.
Hygiène : l’amour, c’est aussi nettoyer
Après chaque repas, tu masses leur petit ventre et leur bas-ventre avec un coton tiède. Doucement. Ils feront pipi, parfois caca. S’ils ne le font pas… danger. Une constipation peut être fatale.
Et quand ils sont sales, tu les nettoies. Pas pour faire joli. Mais pour qu’ils se sentent bien. Pour qu’ils n’attrapent pas de bactéries. Pour qu’ils sentent que tu es là.
Un chaton qui se sent propre, aimé, rassuré, digère mieux. Grandit mieux. Aime mieux.
Quand tu crois que ça va mal…
Je me suis réveillé un matin, et l’un des deux ne bougeait plus. J’ai cru que c’était fini. En fait, il était juste en hypothermie. Trop froid. Trop faible pour pleurer. Je l’ai pris contre moi, j’ai mis ma main sur son dos, j’ai prié… et il a bougé. Lentement. Mais il a bougé.
Alors voici ce que j’ai appris :
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Un chaton froid = urgence. Chauffe-le avant même de le nourrir.
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S’il ne mange pas, ce n’est peut-être pas qu’il n’a pas faim. C’est qu’il n’en a pas la force.
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S’il gémit trop, c’est qu’il a mal quelque part. Ou qu’il est seul.
Sois là. Même s’il ne dit rien. C’est souvent quand ils sont silencieux que c’est le plus grave.
Et puis un jour…
Un jour, tu les vois ouvrir les yeux. Cligner. Regarder. Le monde, toi, leur frère. Tu les vois ramper, puis marcher. Tomber, puis se relever. Tu les entends miauler pour autre chose que le lait. Pour toi.
Et là, tu comprends que tu n’as pas juste sauvé deux vies. Tu as créé deux liens. Deux êtres qui, même devenus grands, n’oublieront jamais que tu as été leur tout.
Et tu sais quoi ? Toi non plus, tu n’oublieras jamais.
Pour conclure
Ce n’est pas un rôle. Ce n’est pas une mission. C’est une histoire d’amour.
Ils étaient minuscules. Fragiles. Abandonnés.
Et aujourd’hui, ils respirent, ils jouent, ils vivent. Parce que tu as tenu bon.
Biberonner un chaton, c’est pleurer en silence à 2h du matin. C’est rire à gorge déployée en les voyant rater une roulade. C’est apprendre chaque jour à aimer mieux.
Plus on les connaît, plus on les aime.
Théo,
Papa des Razpoukets 🐾